3e Roadtrip Triangle de France - Jour 3 : Maussac - Saint-Thibéry




 Gorges du Tarn - NM

 Lundi 1er mai 2017


Horaires de conduite : 10h00 - 23h00

Route : 13h / 486 km
Plein: 23,37€ / 16,67L




Ce matin à l'hôtel j'ai fait des cauchemars, comme toutes les nuits en me réveillant. Cette fois-ci c'était des cauchemars sur mon ex. J'ai voulu me calmer, me rassurer, mais j'ai fait plusieurs crises d'angoisses. Je n'arrivais pas à respirer, j'étouffais. Peut-être que c'est le climat, la pluie torrentielle, qui m'ont fait angoisser, et bien-sûr ma moto qui ne freine pas vraiment dans ces cas-là.

Je me prépare. Mes vêtements sont encore mouillés de la veille. J'essaie de les sécher avec le sèche-cheveux de la salle de bain, et comme je peux, je range mes affaires. Puis je pars dans la cantine de l'hôtel Europa, manger mon petit déj' Je suis un peu en mode automatique, puisque je ne suis plus seule avec moi-même comme sur la route ou dans ma chambre. Je fais ce que je dois faire. Je suis polie. Je prends mon jus d'orange, je prends les croissants. Je fais mon truc. Je suis pas expansive. J'ai peur des gens que je ne connais pas. Dans la salle du déjeuner il y a une femme seule qui mange en silence. Bizarrement, j'ai pas autant peur que d'habitude, et ça me surprend.

Je mange sans rien dire et le directeur d'hôtel arrive, il me voit en tenue de moto et me demande si je suis "la rescapée". Rapport au fait que la veille j'ai été recueillie comme un petit chat tout trempé. Du coup, la femme seule se met à parler avec nous. Elle a apparemment entendu parler de moi! On parle moto, elle me parle sponsors, on parle motivation par une femme seule roulant à moto 125 hors saison dans des paysages isolés. Elle me parle de ses employés, quelle est à la tête d'une entreprise. Elle leur fait passer leur permis de moto par l'entreprise, j'ai trouvé ça sympa!


Je décolle de l'hôtel, je longe des rivières sinueuses, et j'arrive sur les bords de la Dordogne, en passant par des collines. Les routes sont escarpées sinueuses et découvrent l'horizon en vallées creuses. J'aime beaucoup cette couleur verte vive des herbes, qui parvient au bleu des collines au fond. 



Dordogne - D 922



Les petites routes sillonnent dans les petites vallées plates. On sent que l'altitude augmente, mais ça reste encore facile. Les ânes me regardent passer avec leur duvet, comme si c'était des peluches géantes.

Largnac - D 922


J'ai trouvé le point de vue joli, et en un quart de seconde, j'ai décidé de me mettre sur un parking d'un restaurant à gauche. Mais au passage, j'ai faillis me prendre un camion en face. Le restaurateur du Barrage m'a tiré une drôle de tête. J'ai pris vite fait mes photos et je me suis enfuie sur la route en pente à 8%.


Jaleyrac - D 922



Le Barrage - D 922



Dans l'horizon, sur les collines à une dizaine de kilomètres l'herbe brille en miroir qui annonce la possibilité d'une neige dans pas si longtemps.

Sur d'Aurillac - D 920



J'arrive dans des villages médiévaux, dont les pierres se teintent de gris sur les arrêtes et devient rouille sur les façades. C'est très joli comme petit village médiéval. 


Montsalvy- D 920


Montsalvy- D 920



Montsalvy - D 920


On voit entre deux collines s'ouvrant, se dessiner une autre vallée, puis une autre colline, un peu plus bleuté, puis derrière, un peu plus bleuté encore. Il y a de belles couleurs, des arbres aux fleurs violettes à trompettes, des ajoncs jaunes, c'est très joli.


Enguialès - D 920


Il fait beau. Ce sera l'une des rares fois où il fera beau dans ce séjour. Je redescends et il n'y a plus de soleil déjà. J'observe un peu autour de moi, et je m'aperçois soudain que dans les pins, il y a des petites taches blanches. Comme des nids, comme des cocons. La processionnaire du pin est déjà remontée jusqu'ici.  

Avant Fougassièz - D 920


Avant Fougassièz - D 920


J'arrive dans un village avec un vieux pont médiéval aux arches romanes. Je pense que je ne peux pas y aller dessus, donc je continue jusqu'au barrage électrique, et rebrousse chemin sur l'autre flanc.

Fougassièz - D 920


Fougassièz - D 920



C'est un village assez typique de montagne dans son architecture avec des fenêtres sur les toits surplombé par des piques métalliques.

Fougassièz - D 920

J'aime beaucoup ce bocage que je vois autour de moi et au fond les monts enneigés dans les vallées envoie des passages de chemin de fer par d'écran aqueduc au long pied. Je reconnais qu'à voir la neige au fond comme ça m'inquiète un peu. Je me dis quand j'y pense, que je ne vais pas trop m'approcher. Ainsi, je n'aurais pas de problèmes.


Mont d'Aubrac - D 28



Mont d'Aubrac - D 28


Mont d'Aubrac - D 28


Mont d'Aubrac - D 28



Je remonte sur une autre pente, sur une autre colline. La route est encore blanche : un miroir du ciel, encore. J'aperçois de belles constructions architecturales sur des petits villages posés sur des arrêtes. Je voudrais pouvoir m'arrêter, mais j'ai tellement de route à faire, que je ne peux pas sans perdre encore plus de temps. Je monte sur les cols comme celui de Saint Rome de Doyan (907 m d'altitude), et les sommets les collines rondes sont couverts de prairie vertes claires et de forêts vertes un peu plus soutenues.

 Col de Saint-Rome-de-Doyan - 907 m - D 995



Puis j'arrive à un autre village. Je pense qu'il s'agit de Les Vignes, que j'ai dû aller en voyage et que j'ai dû rencontrer en voyage d'études pour le dessiner. 
 

Les Vignes - D 907





Je redescends encore et les prairies redeviennent verdoyantes. Je continue une lente remontée, où la route est tellement humide, qu'elles ont fait un miroir reflétant le blanc des nuages du ciel.



Gorges du Tarn - D 907



Je prends alors une route plate mais sinueuse, au pied des roches qui la creusent, coincé entre la rivière et la montagne.


Gorges du Tarn - D 907




Gorges du Tarn - D 907



Sur le côté, me faisant front, l'immensité d'un côté du V, se dresse fièrement un rocher de falaise blanche. La route est toujours miroitante, plus ou moins proche de la montagne, parfois la creusant, et parfois la trouant comme un trou de serrure. J'aime être engoncée. J'aime être coincée. J'aime sinuer, passer à travers, ressortir, voir l'éclat du soleil se miroiter sur les surfaces blanches, et sur le moutonnement vert olive des chênes verts. C'est vraiment un spectacle grandiose et fantastique.


Gorges du Tarn - D 907




Je ne me lasse de pouvoir le parcourir... Mais je sais que le temps est unique, que le temps passe, et que le soleil se cache maintenant derrière les montagnes. Il ne me reste plus beaucoup de temps de jour. La nuit succédera bientôt. C'est avec cette certitude que la nuit arrive, cette inquiétude lancinante, que je continue et que j'observe la fin du jour dans les montagnes.


Gorges du Tarn - D 907



Gorges du Tarn - D 907
 

Gorges du Tarn - D 907




Gorges du Tarn - D 907


Nous ne sommes encore qu'en fin d'après-midi. Le soleil est encore largement présent, mais quand les vallées sont encaissés, le froid arrive assez rapidement, surtout quand on est mouillée. J'en termine avec ses Gorges du Tarn et traverse cette vallée qui s'élargit. Je regarde vers le nord, puis vers le sud, la rivière s'en va dans la lumière. Je passe au-dessus du pont, se faisant, je vois au nord une moitié de pont, un peu plus en amont. Son arche se miroite dans l'eau calme, et fais comme un croissant blanc qui se détache dans la forêt.


Le Rozier - D 907


J'arrive maintenant au Rozier, petit village escarpé sur les montagnes et son église moyenâgeuse ronde en surplomb. Mes photos se teintent d'eau et deviennent floues, en effet mystérieux. Je suis mouillée jusqu'au pied, jusqu'à la tête, jusqu'à mon appareil photo. En fond de vallée, je continue vers les Gorges de la Jonte, vers l'est.

Cette nouvelle gorge est plus large en apparence, au départ. On y monte et descend un peu plus, avec plus de souplesse. Nous ne sommes plus perpendiculaires au soleil, mais ses rayons traversent cette fois-ci la vallée de part en part, en toute sa longueur. Un peu de soleil signifie un peu de chaleur, et un peu de répit pour le soir qui arrive. Me voilà sortie de cette gorge. Il me reste encore à parcourir quelques cols et quelques collines, pour arriver au plat, vert Montpellier.

Gorges de la Jontes - D 907


Enfin c'est ce que je crois...


J'arrive dans les Cévennes, sur la route frôlant des pentes escarpées d'une vallée, où sinue une rivière. Les pans de la vallée sont enlevés, et les hauteurs sont verticales, d'une roche crayeuse. Les nuages découpés y pénètrent tellement, que la vallée disparaît dans la brume. Chaque bord de colline n'est plus de couleur vive, et les crêtes successives ne se colorent plus de bleu vers l'horizon. Au contraire, leur vert olive perd juste de la saturation et devient de plus en plus gris, donnant un paysage très mystérieux et mystique. Le nuage coule presque avec la rivière, dans la vallée. 


Gorges de la Dourbie - D 48



Je continue à monter, et les roches blanches deviennent ocre, toujours verticales. La route est toujours aussi brillante et la pluie tombe toujours autant. J'ai froid, mais je continue. Et soudain, après avoir monté lentement, se découvre une descente en lacets, dont les épingles sont presque 360 degrés. 

Gorges de la Dourbie - D 48


Gorges de la Dourbie - D 48



Les boucles frôlent le vide, je trouve ça magnifique, parce que j'ai l'impression que je vais continuer tout droit et m'envoler. Mais j'ai un quand même un peu peur du vide. Les panneaux indiquent de 7 à 11% de pente et je dois dire que je ne vais pas très vite!

Gorges de la Dourbie - D 48



Je descends à 10 km heure et je m'entraîne pour le parcours du lent. Ça me fait rire, et peu à peu se découvre la couleur véritable de la rivière. Elle était émeraude. Je descends par paliers de boucles serrées, et j'arrive peu à peu en bas de vallée.


Gorges de la Dourbie - D 48


Les pentes sont raides, et je continue à voir les vallées se découvrir en un vert clair en partie basse, et les coteaux forestier jusqu'en hauteur. 



La vallée est de forme allongée. Et se succèdent, terminées par des falaises blanches plus ou moins grandes. J'aime beaucoup cette régularité, choqué par le naturel abrupt. Ces larges sillons s'articulent comme suit :
- la rivière sinueuse et étroite de la couleur du ciel,
- quelques petites prairie et champs en fond de vallée,
- les arbres sont très réguliers et chétifs le long de ce V, disparaissent au pied des falaises,
- les falaises gis-blanches à ocrées,
- de plus grand fûts végétaux sortent de ces falaises en hauteur.
La pente en elle-même est un patchwork de vert clair de chêne vert et de vert foncé de conifères, troués par des roches tantôt grises, tantôt ocres, tantôt siennes.

Gorges de la Dourbie - D 48


Le temps passe, j'ai beau rouler, je n'arrive pas à le distancer. Je frôle le Mont Aigoual en hauteur. Je continue ma route. Je monte, je monte, et peu à peu, le bord des routes se teintent de blanc, et la neige déborde en une douce vague sur ses abords.

Gorges de la Dourbie - D 48




Vallée de la Vis - D 48




À force de rouler, ma tension se relâche, mon attention se relâche. Dans les derniers virages et les derniers rayons du soleil, je commence à entrer dans un nouvel état de conscience. Cette même sensation que j'ai eu au départ, quand j'ai commencé la moto. Et quand j'ai arrêter d'avoir peur du poids de la moto, peur qu'elle bascule. Ce point d'équilibre précis.
 
J'ai arrêté de sentir la moto et elle enfin elle est devenue une partie de moi. J'ai commencé à glisser sur l'asphalte, comme si je volais sur la route, effectuant de bon virage, sans fatigue, comme si j'étais en train de faire de la godille au ski que je maîtrisais et quand j'étais jeune. Plus aucune difficulté. Littéralement je dansais sur la route. C'est mon bassin qui contrôlait le mouvement, le reste c'est comme surfer sur une vague.


Gorges de la Dourbie - D 48

Je redescends sinueusement vers Le Vigan. Je me perds dans les routes, voulant couper. Je rebrousse chemin.



Le Vigan - D 999

Et la nuit me rattrape, alors que j'arrive à Saint-Martin-de-Londres, heureusement j'ai encore mes phares avant qui fonctionnent. Pendant une heure ou deux, je conduis dans la nuit. Je ne suis pas inquiète. Il n'y a pas beaucoup de voitures, on n'est pas en saison, et je trouve assez facilement la route grâce aux cartes et au GPS.






Me voilà devant la maison de Jésus à Saint-Thibéry. Je suis trempé et j'ai roulé pendant 13 heures pendant 500 km de route de montagne. J'ai le corps qui vibre au rythme du sang et des fourmis. Quand je touche les choses inertes et immobiles, je résonne comme du métal. Je suis devenue ma moto. J'ai l'impression de continuer à faire des lacets, avec le balancier régulier. J'avoue que je suis bien contente de pouvoir m'arrêter me reposer.

J'ai tellement eu froid, que je sentais le bout de mes doigts engourdis. Ca m'a poursuivit au moins 10 jours après la fin du roadtrip. Jésus est vraiment adorable. Il m'accueille très chaleureusement. Je suis rassurée par son accent du sud, d'être arrivé, et d'avoir trouvé ma destination après tant de kilomètres.

Jésus m'a demandé "combien de fois j'ai pensé que c'était une bonne idée que j'avais eu là". C'était ironique. Mais j'avoue vraiment que je me suis demandé plusieurs fois : "mais qu'est-ce que je suis en train de faire ?".

Ici il fait chaud, c'est comme si on avait gagné 10 degrés. On entend les cigales et il me semblait qu'il y a aucun nuage dans le ciel. Mais c'est peut-être une impression. Après avoir mangé, Zeppelin me conduit dans les rues du village, si calme cette nuit. Je me repose même en marchant après toute cette route. Je pars direct me coucher et dormir avec mon doudou lapin de voyage.






Altimètre - source : Google


J'aurais pas imaginé faire 5500 m de descente cumulée et plus de 6000 m de montée. C'est plutôt sympa leur transect dans la fonction vélo de Google.






Quelques choses que j'ai senti en fin de journée :
- Si j'ai réussi ça, je peux tout faire
- J'arrive à faire le balancier plus facilement pour les routes de montagne (sensation de la godille au ski)
- Je peux faire du lent
- Je n'ai plus d'angoisses particulières
- La pluie de Normandie, c'est rien



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